La Direction générale de la Sécurité libanaise a procédé, cette semaine, à l’interpellation de Nazia Marwan Al-Azzi, connu sur les réseaux sociaux sous le pseudonyme de Nazih. Cette arrestation a rapidement enflammé la toile, en particulier au Gabon, où l’activiste d’origine libanaise s’était fait un nom dans la sphère numérique depuis le coup d’État militaire d’août 2023 ayant porté le général Brice Clotaire Oligui Nguéma à la tête de l’État. Nazih, personnage clivant, s’était imposé comme l’un des soutiens les plus bruyants — et parfois embarrassants — du nouveau régime, n’hésitant pas à attaquer violemment, parfois de manière outrancière, aussi bien les opposants que certains cadres proches du pouvoir.
Propulsé par une audience croissante sur les réseaux sociaux, il s’était distingué par un discours souvent provocateur, mêlant insultes, rumeurs, menaces à peine voilées, et théories personnelles sur l’appareil sécuritaire gabonais. La Direction générale des services spéciaux (DGSS) et plusieurs figures de l’exécutif avaient été publiquement pris pour cibles. Parallèlement, diverses accusations avaient commencé à émerger à son encontre : extorsion, tentative de chantage, propos diffamatoires et implication supposée dans des circuits d’influence informels entre la diaspora libanaise et certains milieux économiques au Gabon.

En dépit de ces polémiques, Nazih continuait d’entretenir un noyau de partisans et promettait régulièrement des révélations-chocs. Son dernier projet en date, un “grand déballage” prévu en direct ce samedi 2 août 2025, devait selon lui “faire trembler le pays”. Un événement très attendu sur les plateformes numériques, mais qui n’aura finalement jamais lieu. À la veille de sa diffusion, l’activiste a été arrêté au Liban dans des circonstances encore floues, mais que certaines sources locales relient à des pressions diplomatiques exercées par Libreville, soucieux de préserver la stabilité de ses relations avec Beyrouth.
Au-delà de l’affaire Nazih, cette arrestation soulève des interrogations sur la portée et les limites de l’activisme en ligne, particulièrement lorsque celui-ci s’inscrit dans des logiques personnelles ou identitaires et interfère avec les équilibres politiques ou communautaires. Le Gabon, où la communauté libanaise joue un rôle économique non négligeable, voit dans ce type de dérives un risque de perturbation de la coexistence fragile entre intérêts étrangers et souveraineté nationale. Côté libanais, la coopération sécuritaire semble avoir prévalu, dans un contexte régional marqué par une vigilance accrue vis-à-vis des agitateurs à l’étranger.
Le cas de Nazih illustre l’ambivalence d’un activisme numérique sans filtre, où l’influence instantanée peut rapidement se heurter aux réalités diplomatiques et judiciaires. Si son arrestation a provoqué de nombreuses réactions, elle révèle aussi les limites d’une stratégie de communication construite sur la confrontation permanente. Le virtuel, aussi puissant soit-il, ne protège ni des lois ni des alliances d’État.