Le ministre de la Justice, Dr Séraphin Akuré-Davain, a choisi Lambaréné pour entamer sa tournée nationale les 24 et 25 juillet 2025, une première étape symbolique et révélatrice. Chargé des Droits humains, il a conduit une délégation ministérielle dans cette ville du Moyen-Ogooué pour confronter les réalités locales aux ambitions de réforme judiciaire portées par le Président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema. L’objectif affiché : restaurer la crédibilité d’un appareil judiciaire souvent jugé opaque et inefficace.

Sur place, le constat est saisissant. Les infrastructures judiciaires – notamment le Palais de Justice, le Tribunal administratif et la prison centrale – sont en état de dégradation avancée. Le personnel évoque un fonctionnement au ralenti, en raison de bureaux vétustes, d’un manque d’équipements numériques et d’une désorganisation chronique. À la prison centrale, la surpopulation atteint un seuil critique : 237 détenus pour une capacité maximale de 50 places. Des conditions qui remettent en question la sécurité, l’hygiène et toute possibilité de réinsertion.
Ce déplacement met en lumière une fracture profonde entre les grands centres urbains – comme Libreville ou Port-Gentil – mieux dotés en infrastructures, et les provinces, souvent livrées à elles-mêmes. Cette inégalité territoriale dans l’accès à une justice équitable ne passe plus inaperçue, alors que la transition politique actuelle se veut fondée sur des principes d’équité, de transparence et de rétablissement de l’État de droit.

En choisissant l’observation directe plutôt qu’un simple audit bureaucratique, Akuré-Davain s’inscrit dans une logique de réforme fondée sur les faits. Sa méthode tranche avec l’approche descendante qui a longtemps prévalu. Il s’agit désormais de comprendre les blocages concrets à la base pour y répondre de manière ciblée. Une posture qui, si elle se confirme dans les autres étapes de sa tournée, pourrait annoncer un changement de culture au sein du ministère.
Lambaréné n’est que le point de départ d’une série de visites dans l’ensemble des provinces. À travers cette immersion, le ministère entend produire un état des lieux réaliste de la situation carcérale et judiciaire, province par province. Au-delà des chiffres et des rapports, le terrain impose ses propres priorités – et l’urgence, partout perceptible, semble s’imposer comme la seule ligne directrice viable à court terme.
